Sud-Aveyron : un ouvrage consacré aux modillons, "la bande dessinée de l’époque"
Jean Poujol et la Sarac publient "Les modillons romans du Rouergue méridional".
Jean Poujol, 80 ans, est historien et archéologue. C’est l’inventeur de la collection des Carnets d’histoire et d’archéologie dont le premier volume a été publié en 2009. Il a cédé les droits d’auteur de la marque à la Société archéologique du Rougier et des avant-causses (Sarac).
Jean Poujol est un infatigable auteur. Cette année, il a publié quatre opus dans cette collection. Le dernier vient de sortir. Il a pour titre Les modillons romans du Rouergue méridional (50 pages, 12 €).
"J’ai dédié ce corpus à la mémoire de mon épouse Monique, décédée il y a une dizaine d’années, confie Jean-Poujol. Elle était passionnée d’art roman. J’ai puisé dans ses fiches. C’est en fait son travail remis en forme que la Sarac a édité. Le modillon est une petite console qui soutient à intervalles réguliers la corniche sous les toits des édifices romans et le plus souvent des chapelles. C’est un héritage architectural qui remonte à l’époque romaine, car nombre de constructions arborent des corbeaux non sculptés et non figuratifs."
Le modillon sculpté figuratif fait son apparition en Espagne et relève d’une influence musulmane. On le trouve sur la grande mosquée de Cordoue au VIIIe siècle de notre ère. Par la suite, le modillon figuratif est adopté par les églises du nord de l’Espagne, puis du sud-ouest de la France au début du XIe siècle.
Les modillons coûtaient très cher
À l’avènement du style gothique, le modillon disparaît au profit de la gargouille. "Le modillon, en fait, est un outil pédagogique qui sert à sensibiliser les chrétiens aux péchés capitaux, explique Jean-Poujol. À une époque où les gens ne savent ni lire ni écrire, il faut leur donner des images. Le modillon, c’est la BD de l’époque. Les modillons dénoncent toutes les activités répréhensibles."
Dans le Rouergue méridional, on trouve des modillons dans la région comprise entre le sud de la rivière Tarn et le nord du département de l’Hérault. Les guerres de religion ont énormément détruit d’églises romanes et la Révolution de 1789 a achevé le travail. "Ce qui fait que notre patrimoine en modillons est pauvre et il en a d’autant plus de valeur, souligne Jean Poujol. En plus, pour pouvoir installer des modillons, il faut avoir de l’argent car le sculpteur se faisait payer. Des travaux ont été confiés à de simples maçons, moins chers évidemment. Le résultat s’en ressent en étant de qualité inférieure. Ce sont les seigneurs locaux ou les ordres religieux qui en étaient les commanditaires."
L’auteur cite l’exemple de la chapelle Sainte-Magdeleine de Marnhagues, en cours de restauration, où tout autour de la corniche, l’emplacement des modillons est percé, mais il n’y en a pas : "Ou bien le seigneur de Latour-sur-Sorgues n’a pas eu l’argent pour les faire fabriquer ou ils ont été volés et sans doute vendu, comme l’ont été les fenêtres du château, vendues à un américain."
À Saint-Affrique, quatre églises romanes se sont succédé au bord de la Sorgues à l’emplacement de l’église actuelle. Rien n’a été conservé, pas même un chapiteau. À Millau, c’est pareil. À Bedos, dans la plaine entre Vabres-l’Abbaye et le Cambon, des chapiteaux ont été conservés.
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